Les collectivités doivent souvent gérer des friches industrielles, dont les sols peuvent être pollués et les bâtiments dégradés. Cependant, ces friches peuvent aussi représenter des opportunités pour des projets de développement. La transformation de ces friches s’inscrit dans la volonté de nombreuses collectivités de réduire la consommation foncière. Ce sont des opportunités pour sortir des modes de développement traditionnels sans avoir besoin d’étendre les zones urbaines. Les collectivités locales, l’Ademe, l’Agence nationale de la cohésion des territoires et la Banque des territoires s’impliquent dans l’accompagnement de ces reconversions.
En ce qui concerne les friches industrielles, les contraintes à leur reconversion sont nombreuses. Ces sites sont souvent abandonnés depuis des années, et de ce fait, peuvent contenir des ” sols pollués, la présence d’amiante, de peinture au plomb dans les anciens bâtiments “. Ne convenant plus à l’usage auquel ils étaient destinés, ils sont parfois dans un état de délabrement avancé, nécessitant d’importantes mises à niveau, notamment en termes de performance énergétique”, explique Laurent Chateau de l’Agence française pour la transition écologique (Ademe). Ces caractéristiques ont un impact sur l’équilibre financier ainsi que sur le temps nécessaire à la réalisation des projets.
Des travaux de dépollution importants
Les autorités locales françaises sont depuis longtemps conscientes de la nécessité de transformer les friches industrielles en un usage productif. Ces dernières années, le gouvernement a fourni des ressources pour contribuer à cet effort, mais il est clair qu’il reste beaucoup à faire. Afin de lutter contre l’artificialisation des terres, qui dépasse la croissance démographique depuis des années, les autorités font l’inventaire de toutes les friches de leur territoire. Il s’agit d’une première étape cruciale afin de déterminer ce qui peut être fait pour rendre ces zones à nouveau productives.
Pascal Monier, conseiller communautaire délégué au développement durable du territoire, indique que 1200 friches ont été identifiées par typologie, avec pour objectif d’en recycler une sur cinq, soit 450 hectares. Cette démarche est en cours, l’Agence nationale de la cohésion des territoires et la Banque des territoires finançant un assistant à maîtrise d’ouvrage.
A Anet (2 800 habitants, Eure-et-Loir), l’enjeu est la reconversion d’une ancienne usine de fabrication de boîtes métalliques et d’impression sur tôle, située en centre ville. Depuis 1890, l’entreprise Boudeville-et-Fontaine fait partie de l’histoire de la ville. Elle a aujourd’hui été déplacée vers la zone d’activité en périphérie.Ce site de 4 000 mètres carrés, dont 1 500 mètres carrés de bâtiments, était contaminé par des hydrocarbures, du plomb et de l’amiante et a nécessité d’importants travaux d’assainissement. La ville d’Anet a remporté l’appel à projets de l’Ademe sur la reconversion des friches industrielles en 2020, et a également bénéficié de subventions dans le cadre du programme Petites villes de demain.
Cette reconversion répond à plusieurs enjeux : revitaliser le centre-ville avec la construction d’une vingtaine de logements et de commerces dans une halle dédiée ; créer une nouvelle centralité ; aménager des espaces publics et prévoir plus de stationnement. Pour les relever, la ville d’Anet a mis en place un partenariat avec le groupe Caisse des Dépôts, qui finance l’opération de reconversion via un fonds dédié au financement des petites et moyennes villes.
L’ancienne cimenterie Lafarge au bord de l’étang de Thau est en cours de reconversion par Sète agglopôle Méditerranée.”L’idée de départ était de construire un grand centre de congrès”, explique Jean-Jacques Taillade, directeur général adjoint de l’agglomération. Nous voulions que la population locale puisse s’approprier cette grande agglomération de 80 000 habitants.
Mais après une concertation et les élections municipales, le projet a changé : “Nous allons aménager un grand parc à vocation nature avec des circuits de vélo, de course à pied, de marche…. Nous travaillons pour conserver certains bâtiments qui devaient être démolis dans le premier projet.”
Jean-Jacques Taillade compte sur ces orientations revisitées pour engager un nouveau dialogue avec la région Occitanie, en vue d’une contractualisation. “Le Scot est actuellement en cours de révision.
La vocation d’un site peut être conservée
La majorité de la métropole lyonnaise (59 communes, 1,41 million d’habitants) souhaite que des entreprises ayant la même vocation s’installent sur le site des anciennes usines Bosch, liquidées en 2017.Le projet “usin” est donc né, et son montage a été décidé à la fin de l’année 2020. Un délai assez court, qui s’explique par les quelques contraintes liées à la dépollution.
“Nous sommes sur la commune de Vénissieux, qui est une terre d’industrie. Le site est bien desservi par le tramway et le métro, avec un accès pour les camions, et il est proche d’un lycée professionnel et de logements sociaux. Dix industries se sont déjà installées, dont un producteur de chaudières à faible teneur en carbone. Quinze autres devraient être construites d’ici 2025, avec 30 000 mètres carrés de surface d’activité”, explique Emeline Baume, vice-présidente de la métropole.
La politique d’artificialisation nette zéro, qui doit être appliquée d’ici 2050, va renforcer la prise en compte des friches industrielles, notamment industrielles. Cependant, toutes les entreprises ne sont pas prêtes à céder leurs terrains aux collectivités locales. Elles ont souvent une logique différente, et ce n’est pas un réflexe naturel”, prévient Anne Vigne, chef de projet pour le Plan Urbanisme et Architecture de la Construction.”Il faut vraiment considérer que les entreprises ont un attachement à leur territoire, qui ne va pas dans le sens d’éventuelles reconversions de friches. Et surtout, pour quels projets ? Utiliser les friches industrielles nécessite de trouver de nouveaux programmes à construire. Les projets mixtes, avec logements et services, seront difficiles à trouver, car le bureau, c’est fini !” ajoute-t-elle. Pascal Monier, du Grand Angoulême, s’interroge également sur un modèle économique spécifique qui reste à inventer. “Nous avons besoin d’un regard neuf”, dit-il. Mais il faut aussi créer des incitations pour que les entreprises aient envie d’investir dans ces zones.
La reconversion des friches industrielles, quel chantier !